France : de moins en moins d’offres d’emploi en télétravail

La part des emplois proposant de télétravailler est en chute libre. Le signe que les employeurs français sont moins flexibles qu’il y a quelques mois.

Le télétravail s’était développé depuis la Covid

Selon les derniers chiffres publiés par la Dares, le service statistique du ministère du Travail, 4 070 accords d’entreprise ont été signés sur ce sujet, contre 309 en 2017.

4 070 accords d’entreprise portant sur le télétravail ont été signés en 2021, soit 10 fois plus qu’en 2017. Le déploiement du télétravail suscité par la crise entraîne
une diffusion de ce mode de travail à de nouveaux profils d’entreprise, comme les petites structures. Celles ayant des habitudes de négociation ancrées sont néanmoins largement majoritaires.

Accords et avenants signés sur le télétravail depuis 2017

Le contenu des accords est également marqué par la crise : plus de la moitié est à durée d’application déterminée; une même proportion traite de télétravail exceptionnel.

Le télétravail régulier avec une formule de deux jours par semaine domine.
La mise à disposition d’équipements, comme un ordinateur portable, est traitée par 8 accords sur 10 et l’indemnisation des frais imputables au télétravail par moins de la moitié.

Les rappels au droit à la déconnexion et aux obligations de santé et sécurité vis-à-vis des salariés sont fréquents mais peu d’accords mettent en place des dispositifs de prévention spécifiques au télétravail.

Le marché du télétravail salarié baisse

Pendant les premiers mois de la pandémie de Covid-19, le groupe de presse qui emploie Mathilde* a fermé ses bureaux. Mais après avoir goûté aux joies de la flexibilité, cette chargée RH et ses collègues ont dû se faire une raison. La direction refusant de renégocier les accords de télétravail déjà existants, ce serait une journée à domicile par semaine, pas plus. “Cela n’est pas passé du tout, se désespère-t-elle. On a connu une vague de démissions sans précédent. Nous sommes dans un groupe familial vieillissant, qui ne saisit absolument pas les enjeux derrière le télétravail.”

Les employeurs français seraient-ils revenus à leurs vieilles habitudes ?

Les chiffres exclusifs publiés aujourd’hui par LinkedIn montrent un net recul des emplois offrant la possibilité de télétravailler.

En avril dernier, 9,8% des offres d’emploi publiées sur le réseau évoquaient la possibilité de faire du télétravail. Mais cette part n’a fait que diminuer depuis. Ainsi, en octobre, seulement 6% des annonces étaient concernées. Preuve que le travail à distance est de moins en moins ancré dans les habitudes des employeurs français.

Evolution de la part d'offres d'emploi proposant du télétravail

“C’est quand le télétravail est réellement, officiellement, instauré dans l’entreprise que cela se voit sur les offres d’emploi”

explique Yann-Maël LARHER Ph.D, avocat spécialiste du numérique. Les recruteurs savent que cela attire les candidats, mais ne le précisent que s’ils sont certains de pouvoir se montrer réellement flexibles une fois le candidat embauché.”

Les managers seuls à décider

Pour mieux comprendre cette tendance, LinkedIn Actualités a lancé un appel aux professionnels des ressources humaines. Nous avons reçu plus d’une centaine de réponses. Il en ressort que des accords collectifs prévoyant deux ou trois jours de télétravail par semaine ont été signés chez bon nombre d’employeurs. Les exemples sont nombreux dans les grands groupes, les entreprises de la technologie, ainsi que dans les organisations publiques. Voici des témoignages chez Auchan, Suez, dans une startup, au Conseil département des Hauts-de-Seine, ou encore à la CPAM. Une organisation hybride, entre domicile et bureau, que semblent apprécier les membres de LinkedIn qui ont partagé leur expérience. Cela confirme cette étude de la Dares publiée mercredi dernier, qui démontre que le nombre d’accords d’entreprises concernant le télétravail a été multiplié par 10 entre 2017 et 2021.

Mais beaucoup de témoignages, reçus notamment par message privé, dénoncent un rétropédalage des employeurs sur la question du télétravail depuis quelques mois. Pour ces professionnels, la possibilité de télétravailler n’est pas du tout garantie. “Les services, et donc les managers, sont désormais les seuls à décider d’accorder tout ou partie des trois jours de télétravail hebdomadaires permis à l’échelle de l’entreprise”, confie le responsable paie d’un centre de lutte contre le cancer. Virginie Phulpin, chargée de projet dans la santé, explique dans un commentaire que c’est son supérieur qui est libre d’accepter ou non une journée à distance par semaine. En privé, une responsable de comptes dans un groupe d’édition professionnelle raconte être passée de trois  à deux jours de télétravail hebdomadaires, “pour des raisons de contrôle, à cause de l’inactivité de certains collaborateurs”.

Des rappels des dirigeants

Du côté des cabinets de conseil et de recrutement, qui travaillent avec de multiples entreprises, c’est le même constat. Alors que les candidats repérés par Hugues Prieur, directeur d’un cabinet RH dans le Loiret, demandent systématiquement s’il est possible de faire du distanciel, les employeurs avec qui il traite répondent souvent par la négativePour Audrey Carpentier, consultante RH indépendante en Normandie qui collabore notamment avec des PME, “dans les différentes entreprises que j’ai suivies, il est resté en moyenne une journée de télétravail par semaine, rarement deux”. Quant à Carole, directrice administrative dans une entreprise de services du numérique, elle constate que “le télétravail recule chez nos clients, demandant une présence plus prononcée”.

Pour beaucoup d’employeurs cités par nos membres, télétravail rime encore avec désengagement, voire inactivité. “Les salariés qui ont des velléités de télétravail intensif et de “full remote” ne sont pas bien vus chez nous car jugés peu disposés au travail d’équipe”, témoigne un responsable RH chez un fabricant de pulvérisateurs de peinture. Les dirigeants ont donc à cœur de remettre leurs troupes dans le droit chemin. “Notre PDG a poussé pour un retour au bureau du lundi au vendredi, raconte une responsable RH d’un géant mondial de la bière. Le message officiel est que dans notre culture et nos valeurs, nous travaillons mieux quand nous sommes ensemble.” Dans un groupe bien connu de construction, les réunions démarrent systématiquement par un rappel des dirigeants. “On nous répète que le présentiel permet plus d’échanges et que le télétravail doit rester une exception”, relate une salariée, qui n’ose pas demander plus d’un jour par semaine à distance.

La France à la traîne

Une réticence à lâcher la bride aux salariés, particulièrement marquée dans l’Hexagone. Avec ses 6% d’offres d’emploi proposant de télétravailler, la France se situe en 9e position sur les 12 pays étudiés dans notre étude. Loin derrière l’Espagne (18,4% des offres) ou l’Allemagne (9,4%). En revanche, tous les pays suivent peu ou prou la même courbe, avec un pic du télétravail au printemps 2022 puis une redescente. Un phénomène décrypté par l’entrepreneur Cyril de Sousa Cardoso, joint par LinkedIn Actualités. “En plein confinement, l’idée que le monde de demain pourrait être 100% en télétravail a émergé très rapidement, analyse-t-il. Mais la réalité opérationnelle a montré que l’interaction en face-à-face était nécessaire à la performance collective et à l’épanouissement professionnel. Ce qui se passe actuellement n’est pas un recul du télétravail, mais plutôt l’atteinte d’un point d’équilibre pour un travail hybride de bon sens qui contente les salariés, mais aussi les entreprises et les managers.”

Reste à savoir si, après la crise sanitaire, d’autres événements viendront bouleverser les certitudes des employeurs français. “En cette période trouble non plus sanitaire, mais économique, reculer serait un contresens”, anticipe Cendrine Maillard, directrice du développement RH chez Système U. D’ailleurs, le télétravail des agents de la fonction publique est l’un des piliers du plan de sobriété énergétique du gouvernement, présenté le 6 octobre dernier. L’idée? Demander aux agents de rester chez eux afin de réduire les coûts de chauffage des bâtiments et la consommation de carburant. Un bénéfice à la fois économique et écologique, à l’heure où les Etats cherchent des solutions pour réduire leur empreinte carbone.

Les critères d’éligibilité

Les critères d’éligibilité à l’exercice du télétravail font partie des rubriques systématiquement présentes dans les accords. Ils peuvent être à caractère technique, liés à la nature du poste ou au contrat de travail.

Les conditions techniques ou liées au poste occupé sont similaires d’un accord à l’autre. Il est demandé au salarié de disposer d’un espace calme et isolé sur son lieu de télétravail ; les installations électriques doivent être aux normes et le débit internet suffisant. La compatibilité entre le poste occupé et le télétravail porte essentiellement sur le fait que tout ou partie du travail soit réalisé à partir de supports informatiques et sur la capacité d’autonomie dont dispose le salarié dans la réalisation de ses tâches. Une compatibilité avec le travail en équipe peut également être requise.

Les critères se rapportant aux caractéristiques du contrat de travail varient davantage suivant les accords de télétravail. L’ancienneté dans l’entreprise est un critère récurrent. Elle peut aller de « pas de conditions d’ancienneté » à un minimum de 24 mois. Le seuil est en moyenne de 3 mois. La spécifica- tion de la quotité (temps plein ou temps partiel) est souvent abordée, avec certains accords réservant le télétravail aux seuls salariés à temps plein et d’autres l’accordant aussi bien aux temps pleins qu’aux temps partiels. Lorsque le télétravail est accessible aux salariés à temps partiel, il est cependant associé à un minimum de quotité de travail (généralement 80 % ou plus) et à des règles de proratisation du nombre de journées télétravaillables. Des spécifications sur le type de contrat apparaissent également, distinguant durée indéterminée (CDI) et durée déterminée. La plupart des accords rendent le télétravail accessible aux seules personnes en CDI.

Des divergences dans la prise en charge des frais liés

La mise à disposition d’équipements est traitée dans 81 % des textes de l’échantillon. Il s’agit principalement pour les entreprises de fournir un ordinateur portable aux salariés. Toutefois, une vingtaine d’accords étendent la palette des équipements avec, par exemple, un second écran, une sou- ris et un clavier d’ordinateur, tandis que d’autres prévoient la mise à disposition de mobilier de bureau. Les accords abordant l’octroi d’équipements supplémentaires sont en majorité associés à des formules de télétravail de 3 jours ou plus par semaine.

La prise en charge des frais liés à l’exercice du télétravail est, quant à elle, assez hétérogène. La possibilité de déroger aux stipulations de l’accord national interprofessionnel du 26 novembre 20204 par accord d’entreprise permet une multi- plicité de situations. Un peu moins de la moitié des accords et avenants de l’échantillon (soit 71) prévoient une indemnisation des frais occasionnés par le télétravail. Il s’agit le plus souvent des indemnisations journalières de 2,50 euros ou mensuelles de 10 euros. Les montants peuvent cependant sensiblement varier : la fourchette d’indemnisation mensuelle est comprise entre 8 et 80 euros. Parmi les accords ne prévoyant pas de prise en charge, certains justifient cette position en rappelant que le télétravail est un choix du salarié.

Quelle corrélation avec l’absentéisme ?

  • Télétravail : Recul de 4 points entre avril et octobre 2022.
  • De façon concomitante, l’absentéisme a progressé de 4 points également en 2022, selon Malakoff Humanis.

Est-ce une coïncidence ?

Avec un nombre de salariés arrêtés supérieur à 40% chaque année depuis 2016 , l’absentéisme maladie reste l’un des problèmes majeurs de l’entreprise moderne. Surreprésentation des jeunes, des femmes, des managers, hausse des arrêts pour motif psychologique, augmentation des coupures longues et multiples font partie des autres enseignements saillants du Baromètre Absentéisme 2022 de Malakoff Humanis sorti ce 8 septembre.

Comment expliquer ces résultats ? Sont-ils révélateurs des nouvelles attentes des collaborateurs et d’une transformation profonde du monde du travail ? Quelles solutions envisager pour réduire l’absentéisme professionnel ?
Anne-Sophie Godon-Rensonnet, Directrice des services chez Malakoff Humanis et Adrien Chignard, psychologue du travail et fondateur du cabinet de conseil « Sens & Cohérence » nous livrent leurs analyses au cours d’une interview croisée conjuguant mises en garde et solutions.

« Les phénomènes de désengagement ou de « quiet quitting » ne sont que la réponse de salariés à certaines entreprises qui ont trop valorisé l’affectif au détriment du contractuel et les émotions au détriment des rétributions. »

La pandémie a exacerbé 2 éléments d’explication

  • les difficultés de prise en charge du service public français dédié à la santé mentale ;
  • une culture de la prévention insuffisante même si les entreprises misent de plus en plus sur cet élément afin de tirer leur épingle du jeu en matière de recrutement et d’accroissement de la performance. La seule vocation d’une entreprise est de produire de la valeur. Pour y parvenir, il faut des salariés présents et en bonne santé.

4 grandes actions semblent indispensables

  • mener une analyse fine des données de l’absentéisme. Aujourd’hui, seule 1 entreprise sur 2, en moyenne, s’y attelle ;
  • établir un diagnostic approfondi via le rapprochement de ces datas avec d’autres ou l’interrogation des salariés ;
  • mettre en place un plan d’actions adapté à chaque motif d’absentéisme afin de s’occuper des salariés déjà en arrêt maladie et d’éviter que d’autres ne le soient ;
  • accompagner les managers et les former afin de les aider à faire face aux nouvelles exigences de leur fonction.

Témoignages

Benoît G – Copywriter & Webmarketeur

Cette “tendance” à la reculade du télétravail de la part de certains employeurs en France est très inquiétante.

Et pas seulement pour cause de “changement climatique” et d’absolue nécessité de réduire les déplacements très souvent “à pétrole” (ce qui devrait déjà primer !).

Les arguments avancés sur une prétendue inactivité et un désengagement de collaborateurs en télétravail sont un très mauvais signal de confiance envoyés aux salariés de ces entreprises.

Infantilisant au possible et à mettre direct à la poubelle.

Olivier N – Communicant et formateur

Il est très peu aisé de travailler à la maison régulièrement.

Le besoin de changer de lieu préserve l’équilibre mental.

On voit combien les streamers ont besoin de se retrouver car, solitaires devant Twitch avec une communauté virtuelle, on peut vite manquer de contacts réels.

La vie sur site comporte aussi des aléas, des risques de disputes mais, en étant au même endroit, au même moment, on peut corriger en temps réel une démarche et un propos.

Jean-Christophe R – Recruteur

Télétravail, c’est assez clivant comme sujet, je pense qu’il faut avoir vécu les 2 cotés (employeur et employé) pour avoir une vision d’ensemble. Au delà du “tous fainéants” et “c’est du flicage”.

Lorsque vous faites un chèque enfin de mois pour des salaires et que certains font encore plus semblant que ce qu’il le faisait au bureau, ça doit tendre un peu et donner envie de revenir en arrière.

Parallèlement, les personnes qui bossent mieux et produisent plus en améliorant leur qualité de vie, ont du mal à comprendre un rétropédalage
Sensible comme sujet 😊

Sébastien P –

C’était prévisible. Malheureusement les dirigeants et managers d’entreprises principalement de “culture” franco-francaise sont loin d’être prêts à franchir définitivement le pas, si une situation externe ne les y contraint pas comme en période de Covid.

Malgré les études et l’expérimentation forcée d’il y a quelques mois montrant que la performance est au RDV lorsque la fonction du salarié et les moyens technologiques le permettent, en France la confiance des décideurs envers les équipes manque cruellement. Sans parler du rôle et de l’utilité de nombreux N+1 qui seraient à revoir si leurs équipes étaient à distance, restent aussi prédominantes les mentalités, un peu clichées mais malheureusement trop souvent réelles, du type “il n’y a que sur place que le travail est fait”, “un N+1 doit fliquer son équipe”, “en tant que manager je dois me montrer et faire acte de présence auprès de la direction”…

Le télétravail n’est pas nouveau. De nombreuses sociétés (principalement de grands groupes) ont compris ce qu’elles pouvaient y gagner et l’ont adopté depuis longtemps. Il est dommage pour les autres qu’elles n’aient pas la maturité pour progresser. Le télétravail n’est finalement qu’un des freins à la productivité parmis d’autres.

Marc P. – Formateur

Triste de lire que, pour certains managers, télétravail rime encore avec “glandouille”… Comme si la présence dans les locaux assurait une plus grande productivité !

Enlevez les discussions à n’en plus finir devant la machine à café, la pause-déjeuner qui s’éternise et les pauses cigarette(s) pour les fumeurs, et vous obtiendrez un temps de travail effectif parfois bien inférieur à celui réalisé au domicile 😉.

Avoir confiance en son équipe est un des gages de la réussite collective.

Rappelons néanmoins que cela n’empêche pas le contrôle et le suivi, dans l’intérêt de tous.

Julien V – Développeur JavaScript

Dans les métiers de l’IT et en particulier de la programmation, l’atteinte du maximum de productivité et de qualité requiert une concentration maximale et ininterrompue (que l’on pourrait presque assimilier à un état de “transe”) qui est beaucoup moins facilement atteignable en présentiel.

Les managers & employeurs qui n’ont pas compris cela vont se priver des meilleurs talents. Tant pis pour eux, la sélection naturelle fera son oeuvre…

Sans même parler des discriminations que cela provoque en terme d’accès à l’emploi entre ceux qui habitent en campagne ou dans des “villes moyennes” et ceux qui habitent dans les “grande villes” (38% de la population) , allant à l’encontre même des fondements de la république et du code du travail.

Nathalie H – Coach d’équipe et conférencière

On laisse le choix au manager de valider ou pas les jours de télétravail. Mais on ne lui donne pas les outils et connaissance pour assurer l’engagement des collaborateur et et la dynamique collective dans ce cadre. En effet, cela demande des actions et une préparation différentes de celles pour gérer des équipes 100% en présentiel.

A distance ne veut pas dire distant! Et, peut être que le besoin des managers et collaborateurs n’est pas d’être plus en mode présentiel mais d’avoir plus de relations HUMAINES.

D’ailleurs, on constate que ce n’est pas car on revient sur site que l’engagement est plus fort. Il est même remplacé par la peur de demander un jour supplémentaire de télétravail et par la frustration de devoir ENCORE compromettre la vie personnelle pour satisfaire une exigence NON FONDEE de la partie Professionnelle.

Si au niveau des dirigeants et CEO on prenait conscience du besoin d’accompagner les managers avec des formations, du coaching, et le budget correspondant pour développer la dynamique collaborative à distance, les résultats pour leur business pourraient les surprendre.

Alexandra H – Assistante polyvalente et “couteau Suisse”

Effectivement, les managers manquant souvent de formation (d’ailleurs, évoque t-on seulement le télétravail dans les écoles qui les forment ?) et d’accompagnement. On part souvent du principe qu’ils ont la science infuse en matière de gestion d’équipe mais le monde évolue et ils peuvent être pris au dépourvu aussi et ne pas savoir par quel bout prendre certaines situations qu’ils n’avaient jamais rencontrées auparavant.

L’engagement collaborateur(trice)s repose sur plusieurs éléments et pas un seul (chaque personne ayant des objectifs et besoins différents). Certain(e)s salarié(e)s en effet n’osent plus demander de télétravail (comme si c’était redevenu un truc de geek que seules les start-up pratiquent 😂). Le problème c’est que moins on le demandera, moins on en fera et plus on retournera vers le 100% présentiel.

Enfin, beaucoup de dirigeant(e)s, mais aussi de salarié(e)s, jugent l’intérêt du télétravail à l’aune d’une situation qui n’était ni maîtrisée, ni même préparée.

C’est sûr que bosser avec un vieil ordi, une connexion internet pourrie, sur la table de sa cuisine, avec des enfants qui jouent à proximité, ça ne met pas dans de bonnes conditions.

Un cheval de Troie du libéralisme dans les foyers ?

Didier Gladieu partage son analyse :

Certains, ici, ont bien compris le profit qu’ils pouvaient en tirer et proposent formations, coaching, conseils et prêt à déployer aux entreprises. Il a de nombreux apôtres et ses évêques. Quelques rares déviants osent trouver des inconvénients, des risques, des dangers. J’en suis. Vous l’aurez deviné, il s’agit du télétravail.

Le sujet est hyper médiatique, comme le prouve l’interview de Julia de Funès par le Huffington Post. La philosophe, présentée comme “spécialiste du monde du travail”, y affirme qu’ “avec le télétravail, le travail a perdu son hégémonie”. J’attends avec gourmandise sa démonstration car, une fois n’est pas coutume, je ne partage pas son opinion. Pourquoi ?

Regard dans le rétro : techno et forfait jour

Le télétravail était pratiqué avant que le législateur s’en soucie, par la diffusion des ordinateurs personnels, le phénomène gagnant en ampleur avec les outils de communication portables (pc, tablettes, smartphones).

En effet, sous la pression du management par objectifs et de l’individualisation des rapports salariaux, déclinaisons opérationnelle et gestionnaire de la “corporate gouvernance”, d’abord les cadres (encadrants ou pas), puis plus largement dans l’échelle hiérarchique, des salariés, de plus en plus nombreux, ont emporté du travail chez eux en plus de leur journée au bureau, au labo, … le soir, le week-end, en vacances et même en arrêt maladie. L’aspect purement technologique était facilité pour les cadres par une dimension juridique : le forfait annuel en jours.

Ce dernier, apparu début 2000 était vendu comme devant faciliter la vie des cadres, reconnaître leur autonomie (le plus souvent illusoire compte tenu des processus de travail, de son intensification) leur responsabilité individuelle (dans les cadre de la subordination et sans transfert de pourvoir associé). Le tout au nom de la “liberté” de travailler (mdr). L’objectif, pour les employeurs, était (est) surtout et d’abord de ne plus comptabiliser la masse des heures supplémentaires effectuées par les cadres, donc ne plus les payer (la notion de forfait intégrant les heures sup est un leurre) et de s’exonérer des limites légales et conventionnelles du temps de travail. Il s’est révélé être un outil de servitude accrue. D’autant que, promu par les employeurs, qui veulent l’étendre aux nons cadres -pas fous-, comme les libérant du “carcan” has been des horaires (même variables, même flexibles), il a été intériorisé par les cadres.

Ainsi, quantités d’heures de travail disparaissaient “officiellement”, particulièrement celles effectuées au domicile. Travail au noir ? Où ? Quelles preuves ?

Télétravail : objet magique, bataille culturelle

Je passe sur les évolutions de la loi qui a institué le télétravail. Ainsi que sur l’Accord National Interprofessionnel. Depuis, de nombreux accords de groupe, d’entreprise voire d’établissement ont été signés.

Ce faisant, on légalisait des pratiques déjà existantes pour certains bien qu’illégales, on ouvrait à d’autres populations, on aménageait et encadrait.

Mais aussi, on “faisait entrer le loup dans la bergerie”, dans un plus grand nombre de foyers.

Le télétravail est une forme d’organisation du travail. A ce titre, il doit être analysé dans le contexte économique et sociale dans lequel il s’insère : hyper compétition entre entreprises, chômage de masse, extension de la précarité, peur du déclassement social.

Dans ce contexte, plus qu’avant, la distinction spatiale, comptable et juridique entre “temps de travail”, “lieu de travail” et hors ceux-ci, protège le salarié, le travailleur, de l’emprise de l’emploi. La frontière qui existe entre vie privée et familiale d’avec la vie professionnelle, doit être préservée, la sphère personnelle étanche à la sphère économique.

Le télétravail fait sauter cette frontière.

La prégnance des objectifs et des contraintes professionnelles, renforcée par la culture managériale dominante sinon hégémonique, fait ainsi une entrée légale, officielle dans les foyers. “L’emploi” s’installe dans le salon ou la chambre (combien ont les moyens d’avoir un bureau ?). Le fameux et fumeux “équilibre vie professionnelle/vie privée (familiale, sociale…) est certes affirmé. Sans être jamais sérieusement démontré.

Bien sûr, le télétravail procure quelques avantages individuels non négligeables (essentiellement par la réduction des temps et coûts de transport. Peut-être aussi par l’échappatoire qu’il offre aux mauvaises conditions de travail), et collectifs (moins de pollution due aux transports). Mais je crains que, sur le plan culturel (philosophique ?), par le télétravail, le “travail”, et plus précisément “l’emploi”, ne fasse que renforcer son empreinte dans la société, dans les foyers et donc son hégémonie.

Mais le pire n’est jamais sûr.

Sources : 

En télétravail, les personnes mangent plus rapidement, moins varié et se socialisent moins

Comment les Français s’alimentent-ils en télétravail ? C’est la question posée dans le cadre d’une étude publiée par le Crédoc le 13 décembre 2022, qui a interrogé au printemps 2022 plus de 600 salariés de l’entreprise Danone sur leurs habitudes alimentaires en télétravail lors de la pause déjeuner.

Difficultés à déconnecter le soir, sentiment d’isolement, manque de reconnaissance… Si le télétravail a révolutionné le quotidien des Français·es depuis la pandémie, force est de constater que cette pratique présente malgré tout quelques inconvénients.

En témoigne une nouvelle étude menée par le Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de Vie (Crédoc) pour l’Institut Danone. D’après elle, le télétravail aurait eu un impact négatif sur les habitudes alimentaires des Français·es, en encourageant notamment le grignotage et le manque de variété dans les repas.

Relayées par 20 Minutes, ces recherches se sont portées sur un échantillon de 621 salarié·es volontaires de Danone entre la période de mars et mai 2022. Il ressort d’abord que les télétravailleurs mangent majoritairement seuls : 72 % déjeunent en solo contre seulement 12 % des personnes présentes sur leur lieu de travail. Autre fait marquant, l’étude montre que la durée de la pause déjeuner des télétravailleurs est généralement plus courte que la moyenne. Près de 40 % des salariés interrogés affirment ainsi passer moins de 20 minutes à table pendant leur break de midi lorsqu’ils sont chez eux, contre seulement 18 % de leurs collègues sur place.

« Le chocolat est beaucoup plus consommé en télétravail »

Il ressort de cette enquête qu’en télétravail, on déjeune davantage seul (72 % des répondants) que lorsqu’on est au bureau (12 %). La durée de la pause déjeuner est plus courte lorsqu’on travaille depuis chez soi : moins de 20 minutes pour 38 % des salariés interrogés. Alors qu’au bureau, seuls 18 % y consacrent moins de 20 minutes.

« Le repas est simplifié avec pour plus de 40 % des salariés interrogés une diminution des composantes (entrée, plats, fromages, dessert) du repas et de la diversité, pointe Françoise Néant. On relève aussi davantage de grignotages (+8 %), avec notamment le chocolat qui est beaucoup plus consommé en télétravail (+22 %). »

Il faut préciser que les personnes interrogées bénéficient en l’occurrence d’une offre de restauration collective sur leur lieu de travail, même si elles peuvent aussi déjeuner à l’extérieur.

 

Ces cafés qui en ont ras-le-bol des clients qui sont en télétravail !

En poussant la porte du Kabane, un café rue Faidherbe, dans le XIe arrondissement de Paris, impossible de passer à côté.

C’est écrit noir sur blanc sur une affichette collée à la porte : « Pas d’ordinateur. »

Pourtant, le lieu serait parfait pour télétravailler, avec sa verrière lumineuse et agrémentée d’une multitude de plantes, où l’on peut profiter, un peu à l’écart, de cafés de qualité sélectionnés avec soin.

Une ambiance cosy, le calme de l’arrière-cour, France Gall en fond sonore…

Pour ceux à qui le premier avertissement aurait échappé, en voilà un autre : « No computer, coffee is watching you » ( « Pas d’ordinateur, le café vous surveille »), peut-on lire sur un tableau noir.

source

Sobriété énergétique : on se croirait aux sports d’hiver…

Depuis le 6 octobre et le nouveau plan dévoilé par le gouvernement, l’heure est à la sobriété !

Parmi les trente mesures qui y figurent, on retrouve par exemple l’encouragement au covoiturage, au télétravail, mais aussi l’incitation à réduire à 19 °C max la température de chauffe dans les bureaux.

Fini le chauffage à fond et les fenêtres grandes ouvertes, on est allé tâter la température du côté de nos lecteurs pour connaître leur avis et leurs meilleurs trucs pour affronter l’hiver au bureau.

« J’ai très froid malgré mes pulls, mes chaussures fourrées, mes mitaines… »

Comme Isabelle, nos lecteurs se plaignent d’avoir froid sur leur lieu de travail, notamment depuis l’abaissement de la température à 19 °C.

« Le chauffage est mis en marche à l’embauche, explique Denis. On a froid jusqu’à ce que la température atteigne 19 °C et une fois cette température atteinte, on n’a pas le sentiment d’être réchauffés quand on fait un travail statique et sédentaire. »

Charlotte aussi, qui reste assise toute la journée devant son ordinateur, se gèle au bureau, même avec ses sous-vêtements thermiques, son pull et ses chaussettes en laine.

« Je suis en open space avec une grande hauteur sous plafond et, vraiment, à 19 °C ça caille ! Tout le monde a sa petite doudoune sur le dos à la cafète, on se croirait aux sports d’hiver. »

Ludovic s’inquiète de l’arrivée de l’hiver :

« Si on a un gros pic de froid, je ne sais pas ce que ça va donner. »

D’autres n’ont pas eu à attendre l’hiver pour voir les conséquences néfastes arriver sur leur santé.

« J’ai déjà eu deux arrêts de travail pour bronchite et angine, alors que je ne suis jamais malade…, confie Isabelle.

Je suis constamment fatiguée et j’ai des difficultés à me concentrer et même à réaliser des tâches simples, surtout en fin de journée. Je fais plus facilement des erreurs qu’avant. »

Charlotte enfonce le clou :

« Depuis dix jours, il y a déjà eu trois arrêts maladie dans mon équipe pour des gros coups de froid ».

Heureusement, il y a le télétravail.

« Je fais davantage de télétravail car même en étant à 19 °C dans mon petit appart parisien, le ressenti est bien plus confortable que dans mon open space », avoue Charlotte.

Pour Julia aussi, travailler chez elle est bien plus bénéfique.

« Je prends deux jours de télétravail au lieu d’un par semaine, concède-t-elle. Chez moi, je me chauffe au bois, alors pas de consommation excessive d’électricité et je peux travailler sans plaid ou sans boire un thé toutes les heures… »

Mais comme dit le proverbe : à chaque problème sa solution. Plaids, chaufferettes, boissons chaudes…

Nos lecteurs rivalisent d’idées quand il s’agit de se réchauffer.

« Je laisse toujours un pull et un chèche au bureau. Je rajoute une couche quand il faut, et je me réchauffe les mains sur une tasse de café ou de thé »,

révèle Simon. Meline, en plus d’un plaid et d’une tasse de thé, opte pour une écharpe.

Muriel aussi s’est acheté « une veste chaude sur Vinted » qu’elle compte laisser au bureau « pour les jours où le froid se fera vraiment ressentir ».

Pierre, lui, ne s’embête pas, avec sa « chaufferette électrique pour avoir 22 °C ».

Et pour les plus courageux, Murielle dévoile son astuce :

« Quand j’ai trop froid, je sors, je marche, je fais le tour du bâtiment à l’extérieur, et quand je rentre j’ai l’impression qu’il fait meilleur ! »

A bon entendeur…

source

Règles du télétravail en France : les « conditions » pour bosser à la maison ?

Difficile de l’oublier : la crise sanitaire a confiné une bonne partie des activités, en France et ailleurs. Pour ceux dont le métier le permettait, le télétravail est devenu une habitude, voire même une révélation. 22 % des salariés français ont ainsi télétravaillé chaque semaine de 2021… Côté employeurs ? S’ils étaient seulement 27 % à l’autoriser avant la pandémie, deux ans plus tard, près de la moitié acceptaient cette pratique. Même si le 100 % télétravail est loin d’être une réalité, le nombre de salariés « hybrides » ne cesse d’augmenter. Dans quel cadre, avec quels droits et devoirs ?

En France, comme en Europe, le télétravail est encadré par des textes légaux. Dans les grandes lignes, tout salarié du secteur privé peut, en théorie, bénéficier du télétravail, à partir du moment où il existe un accord collectif (ou une charte) le prévoyant au sein de son entreprise. Cela ne doit donc pas figurer explicitement dans votre contrat de travail. Mais attention… D’une part, votre employeur peut réserver la pratique à certaines catégories de personnel. D’autre part, il peut aussi vous refuser le travail à domicile, mais à condition de motiver sa décision par des éléments objectifs. Par exemple, si vous occupez une fonction non « télétravaillable ». Pas d’accord collectif ni de charte ? Rien ne vous empêche de trouver un accord individuel (simplement formalisé par e-mail) avec votre patron pour profiter du travail à la maison.

Employeur et salarié doivent respecter une série de règles et obligations, encadrées par la réglementation. Pour les entreprises, cela vise entre autres les modalités de contrôle et d’encadrement, histoire d’empêcher, par exemple, les abus de surveillance via les outils de visioconférence.

Votre patron doit également vous informer des plages horaires durant lesquelles vous devez être joignable, ainsi que des restrictions liées aux équipements, outils informatiques, etc. Il doit aussi organiser chaque année votre entretien individuel. Pour ce qui concerne une éventuelle allocation forfaitaire, rien ne l’oblige à en verser une (sauf si c’est prévu dans l’accord collectif). De votre côté, il est important de souligner que vous gardez les mêmes droits et avantages que vos collègues présents au bureau. Les textes légaux apportent aussi des garanties en matière de droit à la déconnexion et de gestion des accidents de travail (survenus à la maison).

Obligatoire pendant une bonne partie de la pandémie, le gouvernement a levé les dispositions spécifiques depuis le 14 mars 2022. Néanmoins, le télétravail reste recommandé pour les entreprises qui le peuvent… Sachez aussi qu’en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure, le télétravail pourrait être imposé par les employeurs sans même votre accord. Le télétravail obligatoire va-t-il revenir à cause de la crise énergétique ? C’est possible, car le gouvernement réfléchirait à une généralisation du travail à domicile pour « économiser l’énergie dans les bureaux » (notamment pour les agents publics). D’ailleurs, cela fait partie des mesures proposées par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) pour freiner la consommation de pétrole.
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La City se réinvente en mode télétravail

Depuis quelques mois, les quartiers de la finance londonienne s’animent au rythme de la nouvelle normalité du télétravail. «Les jeudis sont les nouveaux vendredis, s’amuse André Spicer, professeur de comportement organisationnel à la Bayes Business School. A l’heure de la sortie des bureaux, les bars y sont littéralement pris d’assaut.»

Dans la City et Canary Wharf, les signes de reprise sont désormais bien présents : mi-octobre, Transport for London, l’organisme public des transports en commun de Londres, signalait que l’activité dans le métro était revenue à 79 % des niveaux atteints avant la pandémie, soit un plus haut depuis l’apparition du Covid. Tous secteurs confondus, les commerces refont le plein de clients. « Au cours des deux dernières années, de nouveaux commerces se sont substitués dans la City à ceux qui n’avaient jamais rouvert lors du déconfinement, témoigne Dennis Ferreira, directeur des relations presse chez DBRS Morningstar. L’activité commerciale semble s’être normalisée. »

L’indice Pret de Bloomberg, du nom de la chaîne de cafés et de sandwiches Pret A Manger fréquentée par les financiers pendant la pause déjeuner, donne aussi la température du secteur. Cet indice, qui compare les transactions hebdomadaires à ce qu’elles étaient avant l’éclatement du Covid-19, se hissait en octobre dans la City à 97 % des niveaux pré-pandémiques. « Dans la finance comme dans d’autres secteurs d’activité, la culture de présentéisme cinq jours par semaine, voire plus, est en voie de disparition au bénéfice d’un nouveau modèle de trois jours au bureau et de deux jours de télétravail », poursuit André Spicer. La réception de ce nouveau mode de travail n’est pas nécessairement homogène. « Les jeunes veulent davantage venir au bureau pour apprendre et se faire connaître, d’autres, de par leur rôle, sont dans l’obligation de se rendre sur leur lieu de travail de façon plus systématique. Mais globalement, chacun apprécie cette nouvelle flexibilité », ajoute l’expert.

Dans ce contexte, les bureaux se transforment pour mieux répondre aux nouvelles exigences. « Beaucoup s’apparentent de plus en plus à des espaces de co-working », estime André Spicer. En janvier 2021, Citi annonçait ainsi un projet de rénovation en profondeur de sa tour de 42 étages à Canary Wharf, son siège européen, en prenant en compte les impératifs environnementaux et les nouveaux modes de travail. L’immeuble rénové mettra ainsi l’accent sur une augmentation des espaces collaboratifs.

Pour l’heure, la débâcle annoncée de l’immobilier de bureaux dans les quartiers de la finance londonienne ne s’est pas matérialisée. « Nous avons reçu plus de demandes de construction d’immeubles jusqu’à présent cette année qu’au cours de chacune des deux années précédentes, indique un porte-parole de City of London Corporation. Huit tours en sont au stade de pré-candidature et deux sont maintenant soumises en tant que demandes, ce qui montre la résilience du secteur et de la ville. »

Face au télétravail, les grands écarts existent néanmoins en fonction des institutions : dans ses locaux londoniens de Westferry Circus à Canary Wharf, la néobanque Revolut affiche un taux d’occupation mensuel de 20 %. L’entreprise, qui a adopté une politique 100 % télétravail, a développé depuis peu le concept de « RevSocials », des événements internes mensuels. « Nous sommes bien conscients que nos employés ont besoin de relations solides et d’occasions pour se rencontrer, explique Hannah Francis, responsable RH au sein de la fintech. Ces RevSocials servent ainsi à promouvoir un sens accru de la communauté. »

A l’autre bout du spectre, les chantres du 100 % présentiel font aussi valoir leurs arguments : mi-octobre, David Solomon, directeur général de Goldman Sachs, et farouche militant anti-télétravail, signalait que 65 % de ses salariés étaient revenus au bureau cinq jours par semaine. « Nous avons une entreprise où la moitié des salariés ont une vingtaine d’années, signalait-t-il sur la chaîne américaine CNBC. Ils viennent chez Goldman Sachs pour apprendre, rencontrer des personnes et interagir. »

Selon Grace Lordan, fondatrice de The Inclusion Initiative à la London School of Economics, cette posture relève du passé. « Goldman Sachs peut s’en tirer avec de telles affirmations parce qu’elle reste attractive en raison de niveaux de rémunération bien supérieurs à ceux consentis par ses pairs, estime-t-elle. En revanche, des banques moins prestigieuses devraient accorder une attention toute particulière à cette question si elles souhaitent continuer à attirer les talents. »
Preuves à l’appui : la London School of Economics a réalisé fin novembre une étude qualitative sur l’avenir du travail en s’appuyant sur 100 entretiens de financiers de tous rôles et banques confondus. L’une des conclusions pointe vers une volonté accrue d’autonomie des salariés, vent debout contre les « diktats » de présentiel émanant du top management. « Les salariés de la finance sont attachés à leur emploi et à la vie de bureaux à condition qu’il y ait une vraie raison d’y aller, explique Grace Lordan, co-auteur de l’étude. S’il s’agit de faire du Zoom ou des appels, aucun intérêt ! » Aliénor, qui travaille dans une banque britannique dans la City, a ressenti ce sentiment de frustration. « Pas plus tard que la semaine dernière, je me suis rendue au bureau… et mon équipe n’y était pas. Je suis donc retournée chez moi car ce dont j’avais besoin était précisément d’échanger avec mes collègues et pas de me retrouver dans un espace vide ! »

Au-delà de la question de la répartition des jours de télétravail, les partisans et les détracteurs s’affrontent sur le terrain de la productivité. « Notre étude montre que les salariés ne considèrent pas le bureau comme une mesure de productivité, explique l’enseignante de la London School of Economics. Ils savent très bien identifier ce qui les rend productifs, et leur volonté de télétravailler n’est pas un signe de paresse. » André Spicer préfère renvoyer les sceptiques aux travaux des chercheurs de l’université de Stanford en Californie sur le télétravail. Publiée en juillet, l’une de leurs dernières études a été menée sur un échantillon de 1.612 salariés travaillant au sein de Trip.com, une grande agence de voyages en ligne. Les natifs de dates impaires étaient en télétravail les mercredis et les vendredis tandis que les autres passaient toute la semaine au bureau. Le travail à domicile a entraîné une réduction des taux d’attrition de 35 % et une augmentation des taux d’auto-satisfaction. La structure de la semaine de travail a également été altérée : les travailleurs à domicile travaillaient moins d’heures les jours de télétravail mais davantage les autres jours et le week-end. Enfin, l’expérience a abouti chez les télétravailleurs à une augmentation de lignes de code écrites à hauteur de 8 % tandis que la productivité auto-évaluée des employés a augmenté de 1,8 %. Après la phase d’expérimentation, la société a décidé de généraliser le télétravail.

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Télétravail, démission, les raisons qui nuisent à la santé mentale

Selon une étude commandée par UiPath, 24 % des salariés français déclarent avoir connu des problèmes de santé mentale dans le cadre de leur emploi au cours des trois dernières années.

Depuis 2020, les salariés français ont connu de grands bouleversements et ont dû s’adapter rapidement à de nouvelles méthodes de travail. Le télétravail forcé, associé à un confinement strict, a eu un impact considérable sur la santé mentale des collaborateurs. Pourtant, cette proportion s’avère relativement faible en comparaison à d’autres pays européens (50 % au Royaume-Uni, 39 % en Allemagne ou encore 38 % aux Pays-Bas).

L’étude fait cependant état d’une fracture entre les salariés retournés au bureau et ceux qui ont continué à travailler depuis leur domicile. Les salariés travaillant chez eux semblent être plus exposés aux facteurs de mal-être liés au travail. Ils sont par exemple 65 % à penser que les tâches répétitives au travail nuisent à leur santé mentale, contre 57 % chez les salariés travaillant sur site. « Les employés sont frappés de plein fouet par la situation macroéconomique. Il est important que leurs entreprises les soutiennent dans ce contexte difficile », déclare Mark Gibbs, président, EMEA de UiPath.

« Les entreprises peuvent prendre des mesures concrètes pour s’assurer que les collaborateurs se sentent épanouis dans leur travail. Les technologies d’automatisation en sont un bon exemple. Elles peuvent aider à libérer du temps pour que les employés puissent se concentrer sur des tâches créatives qui contribuent directement à la réussite de leurs équipes et de leur organisation. Grâce à l’automatisation, les entreprises vont pouvoir évoluer rapidement pour donner naissance aux équipes et aux environnements de travail de demain. Les sociétés les plus innovantes ont d’ailleurs déjà entamé ce processus », poursuit-il.

L’enquête, menée auprès de 5.000 employés à temps plein en France, a permis de mettre en évidence que les tâches monotones et répétitives dans leur travail quotidien ont un impact sur l’humeur générale des salariés. 35 % des salariés effectuant 50 % ou plus de tâches répétitives déclarent avoir connu des problèmes de santé mentale liés au travail. C’est 11 points de plus que la moyenne des répondants en France (24 %). Cela a par ailleurs un impact considérable sur l’emploi : 70 % des salariés effectuant 50 % ou plus de tâches répétitives envisagent de changer d’emploi.

Les entreprises courent ainsi le risque de voir leurs salariés démissionner au profit de postes offrant davantage de créativité. Pour la plupart des collaborateurs en France, l’accomplissement de tâches répétitives est source de sentiments négatifs. En effet, 41 % ressentent de l’ennui, 39 % ne sont pas stimulés et 25 % ont l’impression de perdre leur temps. 38 % d’entre eux souhaitent être impliqués dans des tâches plus créatives et 32 % souhaitent la suppression partielle des tâches répétitives.

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5 conseils pour optimiser le télétravail de ses équipes

Votre équipe bénéficie de journées de télétravail ?

Voici 5 bonnes pratiques pour travailler efficacement depuis chez soi.
Désormais, le télétravail fait partie du quotidien de nombreux salariés. Pratique et considéré comme un avantage pour beaucoup, le travail à distance demande toutefois une organisation rigoureuse et des outils adaptés. Découvrez 5 bonnes pratiques pour faciliter le télétravail de vos collaborateurs.

La première règle pour un télétravail efficace est d’offrir aux salariés des conditions de travail idéales. Ainsi, vous devez vous assurer que chaque membre de votre équipe dispose du matériel adéquat, selon leurs besoins : PC, écran d’ordinateur, clavier, souris, casque audio, chaise de bureau ergonomique, repose-pied… Bien sûr, il sera également important de mettre en place un réseau social d’entreprise (Jamespot, Workplace, Yammer…) pour faciliter les échanges et la communication interne, ainsi qu’une plateforme de messagerie instantanée (Slack, Microsoft Teams, Discord…).

Autre aspect important du télétravail : la possibilité d’accéder au service informatique de l’entreprise en cas de problème (souci de connexion, document introuvable, VPN qui ne fonctionne pas…). Lorsque l’on est seul chez soi, il peut être difficile de régler ces petits tracas quotidiens soi-même. Une bonne alternative est de miser sur une solution de bureau à distance. Ces outils permettent notamment aux services IT de prendre la main sur un ordinateur à distance, afin d’analyser le problème rencontré et de dépanner le collaborateur.

Lorsque les collaborateurs sont à distance, ils peuvent parfois avoir l’impression de perdre l’esprit d’équipe, avec pour conséquences une perte de motivation et une productivité en baisse. Pour renforcer la cohésion d’équipe, n’hésitez pas à demander à chaque salarié de communiquer davantage sur les actions en cours et prévues, afin que tout le monde ait une vue d’ensemble sur les projets en cours. Il peut également être intéressant de mettre en place des temps d’échanges collectifs, pour que chacun puisse prendre la parole. Il existe d’ailleurs des outils de réunion tels que Klaxoon, Beenote ou Beekast, qui permettent d’animer vos rencontres.

Aussi, certaines entreprises font le choix de mettre en place des visioconférences quotidiennes, pour reproduire l’ambiance de bureau que l’on peut retrouver en présentiel (café virtuel, team building, etc.).

Finalement, en tant que dirigeant ou manager, l’essentiel est de vous montrer à l’écoute de vos collaborateurs, et de leur accorder votre confiance !

Pour améliorer la collaboration et la productivité, il est important de mettre en place une solution de gestion de projet. Ces outils permettent notamment de suivre les projets et tâches de chaque collaborateur, et de planifier les futures actions à réaliser. Souvent, ils offrent aussi la possibilité de partager des documents (images, vidéos, fichiers PDF…) facilement.
Il existe différentes solutions selon vos besoins. Si vous souhaitez bénéficier d’un outil de gestion de projet complet, vous pouvez vous appuyer sur monday projects, Bubble Plan ou Beesbusy. Il existe également des outils pour mettre en place un projet agile tels que Jira, Trello ou Pivotal Tracker. Certains logiciels sont également disponibles en open source : Redmine, ProjeQtOr, GanttProject…

Avec la démocratisation du télétravail, la notion du droit à la déconnexion est d’autant plus importante. En effet, les salariés doivent pouvoir bénéficier d’un équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Cela signifie notamment que les collaborateurs n’ont pas à être disponibles pour répondre à un mail ou gérer des tâches en dehors de leurs horaires de travail.
Mais cette notion peut être plus complexe en télétravail, où les salariés ont tendance à travailler davantage, et à faire moins de pauses qu’en présentiel. Il faut donc veiller à ce que chacun respecte les règles (plages horaires où les salariés doivent être joignables, ne pas envoyer de mails en dehors des heures de travail, etc.) et proposer un cadre de travail qui répond à ce droit à la déconnexion.

En lien avec le droit à la déconnexion, la gestion du temps est un facteur d’autant plus important lorsque l’on est en télétravail, et nécessite de la part des collaborateurs une certaine discipline. Pour éviter la procrastination ou, au contraire, de dépasser le temps de travail, il peut être intéressant de présenter aux salariés différentes méthodes à appliquer selon les préférences : to-do list hebdomadaire, méthode Pomodoro, etc. Il est également possible de mettre en place un outil de suivi du temps, qui permet de visualiser concrètement le temps passé sur une sous-tâche, une tâche, ou un projet global.

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Télétravail depuis l’étranger : attention à la loi applicable au contrat de travail

Le recours au télétravail a connu une forte expansion depuis quelques années, exacerbée à l’occasion de la crise sanitaire de la Covid-19. Le télétravail présente de nombreux avantages tant pour les salariés que les employeurs et constitue un mode d’organisation du travail plus flexible.

Cependant, le recours au télétravail depuis l’étranger soulève certaines difficultés juridiques, notamment en ce qui concerne la détermination de la loi applicable au contrat de travail.

La difficulté rencontrée provient du fait qu’à la différence des situations de détachement, le télétravail n’est pas directement prévu par les textes européens qui régissent les conflits de loi applicable au contrat de travail.

En effet, en l’absence de clause de choix de loi dans le contrat de travail du télétravailleur, les mécanismes prévus par l’article 8 du Règlement (CE) n°593/2008 du 17 juin 2008 (dit Règlement « Rome I ») ne permettent pas nécessairement de déterminer la loi applicable puisque cet article renvoie :

Ces critères ne nous semblent pas adaptés pour déterminer la loi applicable dans le contexte du télétravail.

En effet, bien souvent, le lieu du domicile du salarié (donc le lieu à partir duquel il télétravaille) ne présente pas de lien avec les éléments de son contrat de travail. On peut penser, par exemple, au cas d’un salarié embauché en France pour prospecter uniquement des clients français mais ayant décidé de télétravailler depuis l’Angleterre.

Dans cette situation, l’exécution du contrat de travail présenterait très peu de lien avec l’Angleterre (hormis le lieu de résidence du salarié) et l’application de la loi anglaise au contrat de travail aurait peu de sens au vu de l’économie générale du contrat.

Afin de se protéger contre ces incertitudes, l’employeur peut choisir d’intégrer une clause de choix de loi au contrat de travail, laquelle précisera la loi qui sera applicable à la relation de travail.

Cet encadrement est néanmoins limité, puisque l’article 8§1 du Règlement Rome I prévoit que la loi choisie par les parties ne saurait faire obstacle aux « dispositions impératives » de la loi qui aurait été applicable au contrat à défaut de choix des parties.

De nouveau, afin de déterminer quelle loi aurait été applicable à défaut de choix, il convient de faire application des mécanismes décrits ci-avant. Ainsi, même en présence d’une clause de choix de loi, le contrat de travail du télétravailleur peut être soumis à des dispositions issues de lois de pays différents (notamment par le jeu des « dispositions impératives » de la loi applicable à défaut de choix). Cette situation peut s’avérer difficile à gérer pour l’employeur, d’autant plus que la notion de dispositions impératives varie d’un pays à l’autre.

 

Le télétravail est-il la conquête sociale du XXIe siècle ?

« Depuis la pandémie, et parce que mon entreprise a embrayé le mouvement, je vis à Montpellier et je travaille pour une entreprise parisienne. Je viens environ deux jours par semaine à Paris, et le reste du temps, je suis dans le Sud en télétravail. Je suis plus productive. Plus alignée avec moi-même sur l’équilibre entre temps de travail et temps libre. Bref, cette vie est bien plus apaisée qu’avant quand j’habitais en banlieue parisienne et que j’avais deux heures de transports par jour et une présence obligatoire tous les jours au bureau », confie Cindy, directrice marketing dans un groupe alimentaire.

Cédric, lui, vit toujours à Paris, mais pratique également l’alternance de deux jours de télétravail et trois jours en présentiel. Les jours de télétravail, il se rend régulièrement dans un coworking proche de son domicile pour lequel son entreprise lui permet un accès privilégié, ou il reste chez lui pour travailler et aussi « s’accorder le droit de faire du sport simplement à l’heure du déjeuner », ou d’aller « chercher les enfants un peu plus tôt que d’habitude au centre de loisirs ».

Un rythme « efficace » de travail qu’il résume avec une formule imagée : « Le télétravail ce sont les nouvelles 35 heures. Il permet une réappropriation du temps. » Images d’Épinal ? Pas certain. Des témoignages en pagaille qui disent une nouvelle relation à la vie professionnelle. Des temps de vie plus apaisés et des embouteillages aux heures de pointe qui s’estompent, assurément.
Se réapproprier le temps. Retrouver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. Apaiser les tensions du quotidien. Antiennes entendues et rabâchées depuis longtemps par nombre de travailleurs et travailleuses.

Antiennes qui relevaient plus du vœu pieux que de la réalité concrète. Antiennes qui résonnent – un peu – comme une nouvelle forme de conquête sociale. Comme si quelque chose de profond et de structurel était en train de se modifier dans le rapport au travail, à l’entreprise et à la vie professionnelle en général.
La pandémie de Covid-19 a démontré une chose : pour travailler, et faire tourner l’entreprise, il n’est pas (forcément) nécessaire d’être présent sur un lieu de travail donné, tous ensemble, au même moment. Drôle de changement de paradigme quand depuis la seconde moitié du xixe siècle avec l’industrialisation le lieu de travail et le lieu de vie ont été séparés.

De quoi, en tout état de cause, chambouler les habitudes, les coutumes, le rapport au collectif d’entreprise, et tout simplement le travail comme objet sociologique et symbolique. De quoi, enfin, s’interroger sur le point de savoir si d’aventure à l’instar des congés payés, de la semaine de 40 heures, puis de 39 heures, puis de 35 heures, la possibilité de télétravailler n’était pas l’une des conquêtes sociales du xxie siècle ?
« Je ne suis pas certain que de penser le télétravail en termes de conquête sociale ou de progrès social soit le bon angle de vue. Une conquête ou un progrès social nécessitent d’être la résultante d’une lutte, d’un rapport de force qui établit ensuite des règles pour donner une dimension concrète aux choses », analyse Denis Maillard, consultant spécialiste des relations sociales, fondateur du cabinet Temps commun et auteur de Tenir la promesse faite au Tiers État (éditions de l’Observatoire, 2020). Et d’ajouter : « La technologie et la pandémie nous ont mis devant le fait accompli. Le télétravail est là, il modifie considérablement le rapport au fait même de travailler collectivement. Pour le meilleur et pour le pire. Tout reste encore à penser et à ajuster. »

Le son de cloche est assez similaire du côté de Sarah Proust, fondatrice du cabinet de conseil et d’accompagnement Selkis, experte associée à la fondation Jean-Jaurès et autrice de Télétravail : la fin du bureau ? (éditions de l’aube, 2021) : « Il convient de prendre le télétravail pour ce qu’il est réellement, c’est-à-dire, une individualisation paroxystique de la relation au travail. Il change la nature du travail pour le faire muter en un objet hybride fait de présentiel et de distanciel, ainsi que de nouvelles formes de management. »

Un travail hybride à deux aspects. D’abord pour les salariés dits de bureau qui mixeront donc les lieux de travail. Ils pèsent, en France, pour environ 60 % de la population active totale. Selon le bureau international du travail (BIT) celle-ci s’élève à 29,2 millions de personnes. Ainsi, ce sont quelque 18 millions de travailleurs et travailleuses qui, aujourd’hui, peuvent prétendre au télétravail. Reste les 11 autres millions de travailleurs qui, eux, ne peuvent pas télétravailler. Hybride donc également que cette population active qui pourrait être amenée à se scinder en deux blocs distincts : ceux qui peuvent télétravailler, et ceux qui ne peuvent pas.

« Cette séparation est une question cruciale. Quid de ce que j’appelle le back-office de la société des services ? Les deux populations vont voir grandir des intérêts divergents. À la base la relation au travail est basée sur une unité de lieu, de temps et d’action qui est le bureau. Or, plus je m’éloigne de ce lieu, plus j’ai besoin de services pour utiliser mon autonomie : livraisons, etc. Ces services sont justement assurés par le back-office de la société. Celles et ceux qui ne peuvent pas télétravailler. En résumé, l’autonomie nouvelle des uns, crée paradoxalement une tension sur le travail des autres, qui sont toujours plus sollicités », analyse finement Denis Maillard. Il voit d’ailleurs un deuxième facteur d’aggravation des relations entre les deux catégories de la population active. « Le back-office de la société assure le confort de celles et ceux qui peuvent télétravailler. Notamment avec les services de livraisons, mais pas seulement. Ce qui frappe, c’est que ce back-office véhicule des services et des objets qu’il ne peut pas consommer. Comme s’il était dans une fête sans avoir le droit de danser », prévient-il.

Au sein de l’entreprise elle-même cette séparation peut aussi créer différents statuts de collaborateurs. Avec d’un côté celles et ceux qui « profitent » de la possibilité de télétravailler pour se réapproprier leur rapport au temps et de l’autre celles et ceux qui ne peuvent pas le faire. Faut-il, dès lors, entamer des négociations sociales pour équilibrer les choses ? « Cette question sera au cœur des préoccupations dans les prochaines années. Nous sommes encore au démarrage de cette nouvelle ère. Il convient, avant de poser les avantages et les inconvénients, d’aboutir à de réels accords autour du travail hybride et d’analyser aussi les risques potentiels du fait de la non-présence des collaborateurs sur les lieux de travail en termes d’assurance », détaille Audrey Richard, présidente de l’ANDRH (Association nationale des Directeurs des Ressources Humaines) et DRH Group chez Up ! (Chèque Déjeuner, etc.).

« Ce qui nous apparaît crucial dans ce moment est de penser ces accords en termes d’équité. Si nous avons fait le choix d’équiper nos salariés en télétravail, nous n’avons pas souhaité aller plus loin notamment dans l’indemnisation des transports collectifs type SNCF. Nous considérons que le télétravail est un outil gagnant-gagnant pour le salarié comme pour l’entreprise. La recherche d’équité se situe plutôt dans la façon dont nous envisageons, à l’avenir, de faire évoluer les salariés de deuxième ligne qui eux aussi ont envie d’accéder à cette possibilité », confie Erwan Olier, secrétaire général en charge notamment des Ressources Humaines, au sein du groupe SIA Habitat, entreprise sociale pour l’habitat (SA d’HLM), filiale du Groupe Habitat en Région, pôle opérateur logement social des Caisses d’Épargne.